[Sélection Roblès 2022] Notre vote !

Cette année, les membres du Cercle littéraire de Dordogne se sont réunies pour débattre et échanger sur leurs lectures de la sélection du prix Roblès 2022. 

L’après-midi a été animé car les 6 livres sélectionnés ont chacun été mis sur la sellette :

« D’Oncle » a été très rapidement écarté, le sujet n’a vraiment pas suscité d’intérêt et les descriptions apocalyptiques du personnage ont lassé les lecteurs. De plus, l’histoire racontée par une nièce n’a pas été jugée crédible. Bref, à part une sensibilisation sur le sort des « hors normes » dans notre société, le livre n’a guère été apprécié. 

« Jetés aux ténèbres » a reçu une critique plus favorable car ce livre nous a tous appris le sort des « communards » ayant été déportés en Nouvelle-Calédonie. La volonté de faire disparaître les auteurs de la révolte y est magnifiquement bien exprimée et la désolation du territoire qui leur est attribué renforce l’idée d’abandon et d’oubli. Le style très lisse de ce roman et le choix de faire raconter cette histoire déplorable par un jeune bourgeois cultivé nous laisse un peu devant un déroulé d’histoire sans grands sentiments, plutôt sur le ton du documentaire que celui du roman. 

« Le Doorman » ou les tribulations d’un Pied-noir à New York… Ce livre a suscité un beau débat car, si l’histoire est relativement inexistante dans ce roman, la vie de cet homme ayant choisi de faire de New York sa ville et l’explorant rue par rue, le déroulé de ses déambulations a finalement été apprécié. Certains lecteurs se sont ennuyé, d’autres se sont laissé emporter, d’autres encore ont été sauvés de l’ennui par les petites anecdotes qui pointent dans le long descriptif des avenues, rues et quartiers. 

« Furies » : ce roman a été fort apprécié par tous, surtout pour le personnage du pompier syrien qui rend compte avec une acuité et un réalisme à la limite du supportable des conditions de vie des rebelles syriens sous le dictat de leur propre gouvernement et des fondamentalistes religieux appelés pour les réduire au silence. Dommage que le personnage de la jeune européenne ait été moins crédible, car il y a de l’émotion dans ce roman. 

« Debout dans l’eau » a été très diversement apprécié. Certains ne sont absolument pas entrés dans le monde de la petite fille abandonnée, de son jardin, de l’étang qui lui paraît immense et de sa vie chez ses grands-parents taiseux, alors que d’autres sont partis dans cet univers enfantin. Débats donc et ressentis différents mais similitude avec le roman de Lindenberg « Un jour ce sera vide », en beaucoup moins poétique. 

Notre coup de cœur a donc été, à l’unanimité :

« Solak » : le roman du froid intense, de la neige, du blizzard, de la promiscuité et du vase clos dans l’abandon, bref un polar dans une base perdue sur une presqu’île de l’Arctique en plein hiver boréal et un huis clos d’hommes renfermés sur eux-mêmes et obligés de se côtoyer pour ne pas mourir de froid. Ce livre est envoûtant, tant par les descriptions de la nature ingrate, que celles du lieu de vie et surtout celles des hommes bloqués là et présentant chacun des profils différents. Un plaisir de lecture, une intrigue terrible peut-être un peu « too much » à la  fin et une incarnation des personnages extraordinaire. 

Nous avons donc envoyé 5 voix pour « Solak » et attendons avec impatience les résultats des votes des autres comités de lecture, pour la désignation du gagnant en fin de semaine.

Ce fut dans tous les cas une belle expérience pour ce premier « Prix Roblès », que nous souhaitons poursuivre l’année prochaine. 

[Sélection Roblès] Zoé Derleyn – Debout dans l’eau (Dominique)

Zoé Derleyn, Debout dans l’eau, 2021, 124 p.

Résumé :
Une petite fille nous raconte sa jeune vie dans une maison entourée d’un grand jardin et surtout agrémentée d’un grand étang. Elle vit avec ses grands-parents car sa mère l’a abandonnée et la seule personne qui l’intéresse est le jeune jardinier Dick. Son grand père, dur bonhomme taiseux est en train de mourir d’une terrible maladie mais il aura eu le temps de lui faire aimer sa terre et son environnement. Les trois chiens sont aussi les compagnons pas toujours désirés mais faisant partie intégrante de la famille recomposée.

Commentaire :
Ce court roman m’a bien fait penser au roman de Lindenberg « Un jour ce sera vide » car les commentaires de cette petite fille sur les gens qui l’entourent sont vraiment très vrais. La part de rêve que lui offre ce jardin magnifique et surtout cet étang qui lui permet de faire face au manque de douceur et d’amour. Les grands parents, malgré leur mutisme et leurs petites manies, sont pour elle des repères et lui procurent la sécurité nécessaire à son développement tout en lui laissant le temps de construire sa petite vie. C’est un roman très touchant et d’une lecture très agréable avec un humour qui permet de ne pas fondre en larmes.

[Sélection Roblès] Madeleine Assas – Le doorman (Pascale)

Madeleine Assas, Le doorman, 2021, 384 p.

Résumé :
Ray est doorman, c’est à dire portier, dans un immeuble cossu de New York. Originaire d’Oran, il a un peu vécu en France. Il travaille très souvent de nuit. Le jour, il déambule dans les quartiers de New York avec son ami Salah, ou sans lui aussi.

Le roman nous décrit New York, les habitants et les transformations des quartiers, et évoque les quelques relations de cet homme plutôt solitaire.

Mon avis : 
Ce roman plaira sans doute aux familiers  de New York qui reconnaîtront les quartiers.

Moi je n’ai pas trouvé beaucoup d’intérêt à cette histoire interminable de ce portier qui déambule dans la ville, même s’il se dégage un certain charme de ces promenades sans fin.

[Sélection Roblès] Rebecca Gisler – D’oncle (Michèle)

Rebecca Gisler, D’oncle, 2021, 128 p.

couverture du livre D'oncle

Résumé :
Une famille en Bretagne, vraiment bizarre pour ne pas dire à la limite de la normale. La fille, narratrice, est entourée de son oncle, « l’oncle » de son frère et de sa mère (sœur de l’oncle). Apparaissent aussi au fil du récit, les grands parents, l’oncle de l’oncle et ses potes de beuverie. Le premier chapitre nous met immédiatement dans l’ambiance, la fille se mettant la tête dans la cuvette des WC pensant que son oncle a disparu par là.

Mon avis :
J’ai trouvé ce récit presque écœurant. Il m’a fait penser, en plus sordide, aux romans du prix Inter sur les pères disparus. L’auteur a sûrement besoin de s’épancher en écrivant mais je ne vois pas en quoi cela nous intéresse. La quatrième de couverture nous parle d’une écriture « entomologiste » (étude des insectes !) et c’est peut-être vrai, mais l’insecte est assez peu ragoûtant. Cette famille, au bord de la détresse morale et sociale ne m’a vraiment pas fait rêver ! Pourtant, elle existe sûrement.

[Sélection Roblès] Sandrine Berthet – Jetés aux ténèbres (Pascale)

Sandrine Berthet, Jetés aux ténèbres, 2021, 352 p.

Résumé :
En 1873, après la Commune en France, les communards sont arrêtés et déportés en Nouvelle-Calédonie, sorte de prison à ciel ouvert.

Le roman décrit les conditions du trajet : des mois dans des cages à fond de cale dans la puanteur et la promiscuité. Puis comment les prisonniers organisent leur quotidien : construire des cabanes de fortune pour se mettre à l’abri, les tentatives d’évasion, la répression.

Mon avis :
Beaucoup de descriptions interminables, des rencontres : l’auteur avec Louise Michel déportée elle aussi. Au moment où quelques femmes débarquent sur cette partie de l’ile réservée aux prisonniers, on craint que ne s’ajoute, aux conditions de la détention, les violences faites aux femmes. Curieusement il n’en est rien, il suffit d’une prostituée pour 500 prisonniers…. Bon, ce n’est pas le thème du roman.

Très documenté, bien écrit, presque trop lisse, comme une copie de bon élève.

[Sélection Roblès] Caroline Hinault – Solak (Michèle)

Caroline Hinault, Solak, 2021, 124 p.

Résumé :
Solak, c’est un petit bout de terre tout au nord du cercle arctique, là où la nuit dure six mois et où le froid vous tue. Deux soldats gardent « le drapeau » et un scientifique analyse la banquise lorsqu’un nouveau venu est hélitreuillé au-dessus du camp pour remplacer un troisième soldat qui s’est suicidé. « Le gosse » va bousculer les habitudes de ce petit groupe et la tension monte, monte…..

Mon avis :
Ce roman est court, brutal, froid et violent, c’est la chronique d’un drame annoncé. Et pourtant il est captivant car la tension est palpable tout au long du récit. Le narrateur, le vieux soldat, raconte, avec des mots très crus, la vie de cette toute petite communauté d’hommes et l’auteur arrive à nous faire ressentir le climat glacial dans lequel se déroule l’histoire. Une histoire très glauque mais aussi pleine de sincérité sur les parcours des personnages.

On n’a vraiment pas envie de lâcher ce roman avant la fin car il nous « percute » ! Premier roman qui donne envie.