Claire Deya – Un monde à refaire (Pascale)

Claire Deya, Un monde à refaire, 2024, 413 p

Résumé :

Avant la fin de la deuxième guerre mondiale, les allemands avaient miné les plages de Provence dans l’éventualité d’un débarquement. En 1945 les français durent s’organiser pour déminer les plages. Ce roman s’inscrit dans la période de travaux de déminage.

Vincent s’engage comme démineur, il est à la recherche d’Ariane, dont il était amoureux avant la guerre. Il rencontre Fabien, ancien résistant, qui dirige les travaux, et les prisonniers allemands contraints à déminer.

Il va s’approcher de ces prisonniers car il pense qu’ils peuvent avoir connu Ariane lors de l’occupation.

Avis :

Le roman fait de nombreux retours en arrière pour raconter différents épisodes de l’occupation. Il montre combien l’espoir de retrouver une personne aimée a aidé les soldats à tenir dans l’enfer qu’ils vivaient dans les camps de prisonniers en Allemagne, comme Vincent, ou dans la Résistance, comme Fabien. Un premier roman très documenté, dont le fil conducteur est la recherche de cette jeune femme. Une histoire très romanesque sur fond de guerre, cà peut paraitre classique, çà l’est, bien sûr. Mais comme Claire Deya est scénariste, elle donne à son roman un côté film de cinéma très convaincant.

J’ai beaucoup aimé.

Louise Erdrich – Le pique-nique des orphelins (Pascale)

Louise Erdrich, Le pique-nique des orphelins, 2015, 500 p

Résumé :

Mary et Karl sont deux enfants de 11 et 14 ans, orphelins après avoir été abandonnés par leur mère en 1932 lors de la grande dépression aux états unis. Ils prennent un train de marchandise pour rejoindre Argus, petite ville du Dakota, pour se réfugier chez leur tante Freezie qui tient une boucherie. Karl fera demi tour, laissant Mary partir seule.

Mary grandira donc avec Sita, la fille de Freezie, fera la connaissance de Célestine, amie de Sita.

Le roman raconte 40 ans de la vie de ces personnages.

Avis :

Le roman est étonnant car les personnages ne sont pas dépeints sous un jour sympathique.

On a plaisir à suivre leurs vies malgré le peu d’empathie qu’ils suscitent. On est plongés dans l’Amérique profonde d’après la crise de 1929. Les chapitres alternent, récits de Sita, de Mary, de Célestine. La narration est impeccable (implacable).

Il y a beaucoup d’amertume dans ces personnages, leurs manières de vivre en couple ( ou non) est tout à fait « décalée ». Je ressors de ce roman un peu interloquée, ne sachant trop quoi penser. Un roman vraiment déroutant à découvrir.

[Prix Roblès 2024] Avril Bénard – A ceux qui ont tout perdu (Dominique)

Avril Bénard, A ceux qui ont tout perdu, 2024, 192 p

Résumé :

L’occident est en guerre et le front se rapproche d’une petite localité qui va être évacuée.

L’armée donne l’ordre de faire un sac et de partir : c’est la douche froide, l’incompréhension.

Comment est ce possible pour Manon et sa fille, Paul, Marek, Mme Dépalle et les autres.

Nous allons suivre ces personnages bousculés dans leur vie pendant l’heure qui précède leur départ.

Avis : Un très court roman mais très prenant et bien accrocheur. Le contexte est ici en pleine actualité et le descriptif de ce départ forcé fait résonance avec les récits de guerre et de déportations qui ont accompagnés mon enfance.

Je trouve, cependant, que le sujet aurait pu être traité plus profondément et j’apparente plus ce livre à une nouvelle qu’à un roman et c’est dommage car il y a évidemment matière à sensibiliser.

[Prix Roblès 2024] Simon Baril – Bleu guitare (Michèle)

Simon Baril, Bleu guitare, 2023, 149 p

Résumé : L’auteur nous fait lire le journal d’un jeune guitariste français vivant à Los Angeles. Il y a neuf ans, il a été victime d’une agression dans une ruelle et ses mains ont été mutilées. Depuis, il ne « vit » plus et se terre dans un studio, ne sortant que la nuit pour marcher au hasard des boulevards de Los Angeles.

Avis :

Premier roman assez court, sous forme de journal intime. J’ai bien apprécié le ton et le style de l’auteur, entre tragique et ironique. Nous sommes dans la tête du musicien puisque nous lisons son journal et le rendu est très intéressant. Un certain suspense nous tient en haleine puisque nous aimerions savoir ce qu’il va lui arriver après ces neuf années de solitude.

L’auteur analyse bien le désir de reconstruire une vie malgré la difficulté qui en résulte. Il lui est peut-être arrivé un accident comme à Sylvain Tesson avec son « sur les chemins noirs » !!!! Les tragédies de la vie semblent inspirer les auteurs.

En prime, nous découvrons un Los Angeles singulier, loin des paillettes et du cinéma.

La fin est un peu brusque mais encore une fois très ironique.

Encore un roman très sympathique.

[Prix Roblès 2024] Gabriel Henry – Blackout ( Pascale)

Gabriel Henry, Blackout, 2023, 204 p

Résumé :

Ulysse est un jeune homme brisé, physiquement, blessé à la tête et au bras. Mais aussi psychiquement, il est devenu amnésique suite à un accident. Il quitte la France pour la Mongolie avec Ariunaa, sa compagne, pour aller vivre dans un village reculé, chez les parents d’Ariunaa.

Chaque jour, dans les gestes du quotidien, il va chercher à retrouver son passé. Ariunna l’y aidera.

D’où viennent ses blessures ? Quel accident l’a conduit ici ?

Avis :

Le mystère plane et demeure jusqu’à la fin du roman, très bien construit. On suit le cheminement d’Ulysse, ses interrogations, ses contemplations de la nature très sauvage. Il observe la vie simple des villageois autour de lui, concentrée sur l’organisation matérielle : sortir les vaches de l’enclos, surveiller leurs déplacements, aller dans la ville voisine pour le marché…

Les descriptions de la nature sont somptueuses, l’écriture est très poétique, très attachante.

J’ai pensé à Continuer, de Laurent Mauvignier pour les grandes descriptions des steppes mongoles, et le côté « réparateur » de la nature pour les humains « cabossés » de la vie.

[Prix Roblès 2024] Cécile Tlili – Un simple dîner ( Michèle)

Cécile Tlili, Un simple dîner, 2023, 179 p

Résumé : Etienne, un jeune avocat très ambitieux invite un couple d’ami à diner chez lui. Il a une idée derrière la tête. Sa compagne, Claudia, s’échine à préparer un diner digne de ce nom. C’est une femme très timide et mal dans sa peau qui est terrorisée à l’idée de recevoir du monde chez elle. Johar et Rémi arrivent et le huis clos de la soirée peut s’installer.

Avis :

Roman assez court mais avec un ton très juste. Les tourments et les doutes de chacun sont exprimés avec clarté et sensibilité. Cela m’a fait penser au film « cuisine et dépendance » que j’avais beaucoup aimé, l’humour en moins.

L’écriture de l’auteur est simple et fluide et le ton restitue à la perfection les angoisses des uns, la nervosité des autres puis finalement les décisions qui en découlent.

Roman très sympathique.

Sarai Walker – Les voleurs d’innocence (Pascale)

Sarai Walker, Les voleurs d’innocence, 2023, 624 p

Résumé :

Voici l’histoire d’une famille de 6 filles Aster, Rosalind, Calla, Daphné , Iris, et Hazel, dans les années 50 à Bellflower près de New York.

Leur père Henry Chapel est un richissime marchand d’armes. Leur mère, Belinda, mariée sans amour, est de constitution fragile. Elle a un sixième sens, pressent les évènements tragiques. On la croit folle. Lorsque la fille ainée Aster est sur le point de se marier, Belinda prédit un malheur, mais ne pourra empêcher ce mariage. Aster mourra mystérieusement dès le lendemain de la noce.

La deuxième des filles, Rosalind connaitra elle aussi un sort funeste, comme si une malédiction frappait la famille.

Avis :

L’histoire est racontée par Iris, la cinquième fille. On ne sait comment elle a échappé à la malédiction ni ce qu’elle a dù sacrifier pour survivre. Ce roman est étonnant car il nous tient en haleine jusqu’à la toute fin, bien que l’histoire soit connue depuis le début. Je n’ai pas bien compris ce que l’auteur cherchait à démontrer, mais j’ai marché jusqu’à la fin.

Un roman sur la sororité, un roman féministe ?

Tiffany McDaniel – Du côté sauvage (Pascale)

Tiffany McDaniel, Du côté sauvage, 2024, 720 p

Résumé :

Dans les années 80, à Chillicothe, dans l’Ohio, vivent deux sœurs jumelles de 10 ans Arc et Daffy. Filles de deux parents toxicomanes, elles sont élevées par leur grand mère maternelle mamie Milkweed, qui leur enseigne la poésie du monde et la beauté de la vie.

Après la cure de désintoxication de leurs parents, elles retourneront vivre avec eux, mais rapidement ils « replongeront » dans la dépendance.

En 1993, Arc découvre dans la rivière, le cadavre d’une jeune femme, Harlow, junkie et prostituée.

D’autres jeunes femmes, amies de Arc et Daffy, seront assassinées et jetées à la rivière.

Avis :

Ce roman est le 3ème de Tiffany McDaniel. On retrouve les mêmes thèmes que dans les romans précédents : un personnage empreint de la poésie et de la beauté du monde, la violence, la noirceur de la destinée humaine. Dans les deux autres romans il y avait une lueur d’humanité sans cesse présente. Ici quelqu’un a éteint la lumière. Il ne reste que le côté glauque, sordide et désespéré de ces femmes toxicomanes et prostituées.

Les violences faites aux femmes sont décrites crûment et le déterminisme social qui pèse sur les jeunes femmes nous glace.

Le roman est inspiré de faits réels : disparition et meurtres de 6 jeunes femmes à Chillicothe.

Un roman d’une grande noirceur qui nous laisse complètement KO.

[Prix Roblès 2024] Paul Saint Bris – L’allègement des vernis (Michèle)

Paul Saint Bris, L’allègement des vernis, 2023, 347 p

Résumé : Nous allons suivre Aurélien, directeur du département des peintures du Louvre qui doit prendre en main la rénovation du plus célèbre tableau du musée, la Joconde et, en parallèle, Homéro, agent d’entretien au musée, qui tombe amoureux de Mona Lisa.

Aurélien fait confiance à Gaetano, un restaurateur qu’il admire, pour ce travail sur La Joconde mais il n’est pas très rassuré.

Avis :

C’est un roman un peu technique car plein de références de peinture, notamment italienne, mais pas barbant pour autant. Au contraire, il nous fait découvrir la vie des personnes qui travaillent au Louvre, de la directrice en relation directe avec le ministre de la culture, aux agents de nettoyage et de sécurité.

Aurélien nous permet de réfléchir à la beauté en général, dans la peinture mais aussi dans la vie. Cette beauté peut-elle perdurer à notre époque qui met en avant le pratique, le pas cher et le jetable ? Et la Joconde, pourquoi le monde entier vient la voir et pourquoi sa restauration risque d’être un raz-de-marée médiatique planétaire ?

Gaetano, lui, nous fait connaitre le travail de ces restaurateurs de tableaux qui ont une responsabilité écrasante lorsqu’ils travaillent sur des tableaux célèbres.

Enfin, Homéro, personnage lunaire et poétique, nous montre que l’art et la beauté peuvent toucher tout un chacun, même néophyte. Il suffit de le ressentir …..

Roman original porté par une écriture fluide, gracieuse, et érudite sans jamais peser, avec ce qu’il faut de suspense pour donner envie de poursuivre la lecture et de références artistiques pour nous permettre d’enrichir notre culture. L’humour et la fantaisie satirique servent à merveille l’histoire. Entre la conservation et la restauration des œuvres d’art, en passant par les enjeux médiatiques et financiers d’un grand musée, c’est finalement à une réflexion sur les évolutions récentes de la société tout entière que nous convie l’auteur.

J’ai bien aimé.

[Prix Roblès 2024] Xavier Donzelli – Et par le pouvoir d’un mot (Pascale)

Xavier Donzelli, Et par le pouvoir d’un mot, 2023, 360 p

Résumé : Ce roman raconte la vie de Paul Eluard pendant les années 1941 – 1945. Il raconte comment son poème : Liberté, va devenir le symbole de la résistance. Nous suivons donc les destins croisés de Nusch, sa compagne, Max Pol Fouchet, Louis Parrot, Raymond Aron et d’autres personnages moins illustres, tous plus ou moins « résistants » à leur manière, en imprimant, diffusant des recueils de poèmes.

Avis :

La résistance par la poésie en quelque sorte. Moins flamboyant que les combats armés, peut être aussi dangereux (quoique).

Un roman très documenté, une narration dans l’ordre chronologique, très appliquée, très propre, très lisse, qui n’évite pas certains clichés. Une narration pas très romancée en fait, il manque des sentiments, des sensations, des descriptions des décors, des évènements saillants. Les passages les plus réussis sont le largage des recueils de poèmes sur la ville de Nantes par les aviateurs anglais.

Après avoir fini le roman, je n’ai pas bien compris si Eluard a été résistant, ou si c’est sa seule poésie qui était résistante.