Yann Brunel, Homéomorphe, 2022, 530 p
Résumé :
Dans un hôpital de la banlieue de Kiev, un vieil homme victime d’une agression, Vladimir P. est admis aux urgences. Interrogé par la police il accuse son fils Dmitri, mathématicien de génie qui vit comme un clochard dans cette banlieue sordide appelée le Quartier.
Dmitri se souvient de son enfance dans le Quartier avec ses parents et son grand frère Ivan qui le protégeait, et de l’accident dont ils furent victimes en 1995, dans lequel sont morts sa mère et son frère.
Dmitri va s’occuper de son père à sa sortie de l’hôpital, avec Marie, une infirmière dont il fut amoureux autrefois. Il veut enfin comprendre ce passé qui le hante.
Avis :
Ce roman est difficile à résumer car il est construit comme un jeu d’échec, comme un parcours mathématique. Pour chaque chapitre une maxime mathématique éclaire le récit (pour ceux qui la comprennent).
Le passé est dévoilé peu à peu mais le mystère de la haine père-fils demeure. Le spectre du frère décédé est omniprésent : c’est Ivan qui raconte toute l’histoire. Le texte est très poétique, la noirceur colle à toutes les pages, à toutes les lignes. On est presque dans le cerveau embrumé de ce mathématicien alcoolique.
J’ai bien aimé le thème du roman, l’ombre du passé qui plane sur tous les personnages, la construction aussi : les événements passés qu’on découvre peu à peu.
Et surtout la merveilleuse symbiose entre le fond et la forme : les longs développements, pesants, alambiqués presque indigestes qui restituent si bien l’état d’esprit de Dmitri.
Yann Brunel réussit à allier poésie et mathématique, poésie et stratégie des échecs. C’est vraiment époustouflant.