[Prix Roblès 2024] Avril Bénard – A ceux qui ont tout perdu (Dominique)

Avril Bénard, A ceux qui ont tout perdu, 2024, 192 p

Résumé :

L’occident est en guerre et le front se rapproche d’une petite localité qui va être évacuée.

L’armée donne l’ordre de faire un sac et de partir : c’est la douche froide, l’incompréhension.

Comment est ce possible pour Manon et sa fille, Paul, Marek, Mme Dépalle et les autres.

Nous allons suivre ces personnages bousculés dans leur vie pendant l’heure qui précède leur départ.

Avis : Un très court roman mais très prenant et bien accrocheur. Le contexte est ici en pleine actualité et le descriptif de ce départ forcé fait résonance avec les récits de guerre et de déportations qui ont accompagnés mon enfance.

Je trouve, cependant, que le sujet aurait pu être traité plus profondément et j’apparente plus ce livre à une nouvelle qu’à un roman et c’est dommage car il y a évidemment matière à sensibiliser.

[Prix Roblès 2024] Simon Baril – Bleu guitare (Michèle)

Simon Baril, Bleu guitare, 2023, 149 p

Résumé : L’auteur nous fait lire le journal d’un jeune guitariste français vivant à Los Angeles. Il y a neuf ans, il a été victime d’une agression dans une ruelle et ses mains ont été mutilées. Depuis, il ne « vit » plus et se terre dans un studio, ne sortant que la nuit pour marcher au hasard des boulevards de Los Angeles.

Avis :

Premier roman assez court, sous forme de journal intime. J’ai bien apprécié le ton et le style de l’auteur, entre tragique et ironique. Nous sommes dans la tête du musicien puisque nous lisons son journal et le rendu est très intéressant. Un certain suspense nous tient en haleine puisque nous aimerions savoir ce qu’il va lui arriver après ces neuf années de solitude.

L’auteur analyse bien le désir de reconstruire une vie malgré la difficulté qui en résulte. Il lui est peut-être arrivé un accident comme à Sylvain Tesson avec son « sur les chemins noirs » !!!! Les tragédies de la vie semblent inspirer les auteurs.

En prime, nous découvrons un Los Angeles singulier, loin des paillettes et du cinéma.

La fin est un peu brusque mais encore une fois très ironique.

Encore un roman très sympathique.

[Prix Roblès 2024] Gabriel Henry – Blackout ( Pascale)

Gabriel Henry, Blackout, 2023, 204 p

Résumé :

Ulysse est un jeune homme brisé, physiquement, blessé à la tête et au bras. Mais aussi psychiquement, il est devenu amnésique suite à un accident. Il quitte la France pour la Mongolie avec Ariunaa, sa compagne, pour aller vivre dans un village reculé, chez les parents d’Ariunaa.

Chaque jour, dans les gestes du quotidien, il va chercher à retrouver son passé. Ariunna l’y aidera.

D’où viennent ses blessures ? Quel accident l’a conduit ici ?

Avis :

Le mystère plane et demeure jusqu’à la fin du roman, très bien construit. On suit le cheminement d’Ulysse, ses interrogations, ses contemplations de la nature très sauvage. Il observe la vie simple des villageois autour de lui, concentrée sur l’organisation matérielle : sortir les vaches de l’enclos, surveiller leurs déplacements, aller dans la ville voisine pour le marché…

Les descriptions de la nature sont somptueuses, l’écriture est très poétique, très attachante.

J’ai pensé à Continuer, de Laurent Mauvignier pour les grandes descriptions des steppes mongoles, et le côté « réparateur » de la nature pour les humains « cabossés » de la vie.

[Prix Roblès 2024] Cécile Tlili – Un simple dîner ( Michèle)

Cécile Tlili, Un simple dîner, 2023, 179 p

Résumé : Etienne, un jeune avocat très ambitieux invite un couple d’ami à diner chez lui. Il a une idée derrière la tête. Sa compagne, Claudia, s’échine à préparer un diner digne de ce nom. C’est une femme très timide et mal dans sa peau qui est terrorisée à l’idée de recevoir du monde chez elle. Johar et Rémi arrivent et le huis clos de la soirée peut s’installer.

Avis :

Roman assez court mais avec un ton très juste. Les tourments et les doutes de chacun sont exprimés avec clarté et sensibilité. Cela m’a fait penser au film « cuisine et dépendance » que j’avais beaucoup aimé, l’humour en moins.

L’écriture de l’auteur est simple et fluide et le ton restitue à la perfection les angoisses des uns, la nervosité des autres puis finalement les décisions qui en découlent.

Roman très sympathique.

Sarai Walker – Les voleurs d’innocence (Pascale)

Sarai Walker, Les voleurs d’innocence, 2023, 624 p

Résumé :

Voici l’histoire d’une famille de 6 filles Aster, Rosalind, Calla, Daphné , Iris, et Hazel, dans les années 50 à Bellflower près de New York.

Leur père Henry Chapel est un richissime marchand d’armes. Leur mère, Belinda, mariée sans amour, est de constitution fragile. Elle a un sixième sens, pressent les évènements tragiques. On la croit folle. Lorsque la fille ainée Aster est sur le point de se marier, Belinda prédit un malheur, mais ne pourra empêcher ce mariage. Aster mourra mystérieusement dès le lendemain de la noce.

La deuxième des filles, Rosalind connaitra elle aussi un sort funeste, comme si une malédiction frappait la famille.

Avis :

L’histoire est racontée par Iris, la cinquième fille. On ne sait comment elle a échappé à la malédiction ni ce qu’elle a dù sacrifier pour survivre. Ce roman est étonnant car il nous tient en haleine jusqu’à la toute fin, bien que l’histoire soit connue depuis le début. Je n’ai pas bien compris ce que l’auteur cherchait à démontrer, mais j’ai marché jusqu’à la fin.

Un roman sur la sororité, un roman féministe ?

[Prix Roblès 2024] Paul Saint Bris – L’allègement des vernis (Michèle)

Paul Saint Bris, L’allègement des vernis, 2023, 347 p

Résumé : Nous allons suivre Aurélien, directeur du département des peintures du Louvre qui doit prendre en main la rénovation du plus célèbre tableau du musée, la Joconde et, en parallèle, Homéro, agent d’entretien au musée, qui tombe amoureux de Mona Lisa.

Aurélien fait confiance à Gaetano, un restaurateur qu’il admire, pour ce travail sur La Joconde mais il n’est pas très rassuré.

Avis :

C’est un roman un peu technique car plein de références de peinture, notamment italienne, mais pas barbant pour autant. Au contraire, il nous fait découvrir la vie des personnes qui travaillent au Louvre, de la directrice en relation directe avec le ministre de la culture, aux agents de nettoyage et de sécurité.

Aurélien nous permet de réfléchir à la beauté en général, dans la peinture mais aussi dans la vie. Cette beauté peut-elle perdurer à notre époque qui met en avant le pratique, le pas cher et le jetable ? Et la Joconde, pourquoi le monde entier vient la voir et pourquoi sa restauration risque d’être un raz-de-marée médiatique planétaire ?

Gaetano, lui, nous fait connaitre le travail de ces restaurateurs de tableaux qui ont une responsabilité écrasante lorsqu’ils travaillent sur des tableaux célèbres.

Enfin, Homéro, personnage lunaire et poétique, nous montre que l’art et la beauté peuvent toucher tout un chacun, même néophyte. Il suffit de le ressentir …..

Roman original porté par une écriture fluide, gracieuse, et érudite sans jamais peser, avec ce qu’il faut de suspense pour donner envie de poursuivre la lecture et de références artistiques pour nous permettre d’enrichir notre culture. L’humour et la fantaisie satirique servent à merveille l’histoire. Entre la conservation et la restauration des œuvres d’art, en passant par les enjeux médiatiques et financiers d’un grand musée, c’est finalement à une réflexion sur les évolutions récentes de la société tout entière que nous convie l’auteur.

J’ai bien aimé.

Alexis Michalik – Loin ( Michèle)

Alexis Michalik, Loin, 2021, 762 p

Résumé :

Charles, le père d’Antoine et Anna, a disparu du jour au lendemain il y a dix-sept ans. Il n’a pas donné signe de vie depuis son départ.

Un jour, en relevant le courrier de sa mère, Antoine, qui avait 6 ans lors du la disparition de son père, trouve un courrier de la Poste : une carte postale datée de dix-sept ans en arrière, a été perdue puis retrouvée enfin, et la Poste l’achemine à son destinataire. C’est une carte de Charles, en provenance d’Autriche.

Antoine et son meilleur ami, Laurent, décident de partir pour l’Autriche alors qu’ils avaient prévu de passer une semaine à Londres. Ils n’avertissent personne, sauf Anna. Suivre la piste de Charles va se révéler bien plus complexe et beaucoup plus longue que prévue.

Avis :

Dans la famille, nous adorons les pièces de théâtre d’Alexis Michalik et je pense que nous les avons toutes vues (ou presque !).

Et bien ce roman est de la même veine que ses pièces : un tourbillon de dates, de lieux, de personnages, d’histoires. Et comme au théâtre, il faut s’accrocher pour suivre ! (Je me souviens de la première pièce que nous avions vue et des têtes que nous faisions à la fin !) Certains pourraient se perdre dans ce roman à tiroirs !

Mais pour moi ce fut un vrai plaisir, une plongée dans l’histoire de l’Europe du XXème siècle. Avec l’auteur, nous traversons à peu près tous les pays envahis par l’Allemagne durant la dernière guerre et ceux du bloc de l’Est, occupés, libérés, en guerre permanente depuis près d’un demi-siècle. C’est foisonnant de vie et les dialogues sont souvent savoureux.

Enfin, l’auteur pose la question de « pourquoi le voyage ? », quel est le but de la vie ? Est-on un homme bien si l’on ne fait rien de sa vie, a-t-on droit à l’erreur de parcours si l’on se rattrape après ? faut-il être bien sage comme Antoine ou plein de folie, parfois destructrice, comme sa sœur ?

Et la réponse n’est pas évidente bien sûr ! A chacun de trouver celle qui correspond à sa philosophie de vie.

Mélissa Da Costa – Les lendemains (Michèle)

Mélissa Da Costa, Les lendemains, 2021, 378 p

Résumé :

Amande vient de subir un double deuil. Elle a perdu son mari dans un accident de moto et, suite à ce traumatisme, l’enfant qu’elle attendait est mort-né.

Elle quitte sa ville, ses amis et sa famille et loue une maison isolée en Auvergne car elle ne veut voir personne, et même pas la lumière du jour. Ce lieu arrivera-t-il à adoucir ses pensées noires ?

Avis :

Suite à la lecture de « tout le bleu du ciel », j’ai voulu poursuivre avec cette autrice. Les deux histoires tournent autour de la mort, ou plutôt du deuil et ce n’est donc pas très gai malgré l’espoir qui pointe toujours en fin de roman.

Un roman émouvant, facile à lire, qui peut faire prendre conscience que cette période de deuil se vit de plusieurs façons et qu’il ne faut rien brusquer.

Heureusement, dans « les lendemains », des pointes d’humour jaillissent avec la rencontre d’Amande et des jeunes dont s’occupait son mari.

Donc un roman plein d’émotion qui donne une place très importante à la nature. Une belle lecture.

Maria Barbal – Celle qui se taisait ( Michèle)

Maria Barbal, Celle qui se taisait, 2023, 198 p

Résumé :

L’Espagne profonde (la catalogne plutôt), dans les années 1920, est très rurale et ses habitants sont pauvres.

Concepcio, dit Conxa, est la cinquième de six enfants. A treize ans, Conxa est douce et raisonnable, et elle ressemble à « la tante », alors c’est elle qui ira chez la sœur de sa mère qui n’a pas d’enfants pour l’aider. Elle quitte son village avec son baluchon, rejoint « l’oncle » au marché et le suit à pied, derrière la mule qui le porte. Elle va vivre dans ce nouveau village, entre travail aux champs et travail à la maison. Puis la République est proclamée, et, quelques années plus tard, Franco prend le pouvoir et pourchasse les républicains.

Avis :

La lecture d’un nouveau roman sur l’Espagne et sa guerre civile m’a été conseillée par ma libraire. C’est, cette fois, un roman court, écrit comme si l’héroïne nous parlait avec ses mots très simples d’une fille peu instruite, avec son incompréhension du déroulement de l’Histoire de son pays.

J’ai lu ce roman en quelques heures, il dessine un portrait simple, plein de pudeurs, très réaliste de cette Espagne rurale qui ne vit que de labeurs, sans grands espoirs. Le fait que Conxa ne comprenne pas grand-chose aux évènements qui traversent son pays nous donne seulement son ressenti. Cela est un peu frustrant parfois mais je pense que c’est ce que recherchait l’autrice.

Julia Colin – Avant la forêt (Michèle)

Julia Colin, Avant la forêt, 2023, 376 p

Résumé :

Dans un avenir pas très lointain, la France (et le monde) est en profond déclin. Deux familles décident de quitter Paris, trop dangereux et en pénurie de tout, pour Marseille, où habite un de leurs oncles. Les deux adolescents, Elie et Calme semblent partir pour une aventure, mais ils déchantent très vite lorsque la voiture tombe en panne sèche et qu’ils ne trouvent pas d’essence. Ils arrivent à Lyon, où un soulèvement sépare les parents de Calme du reste de la troupe. Ils ne les reverront jamais.

Après quelques années passées à Marseille pour Elie, ses parents et Calme, ils décident de repartir pour Massat, un petit village ariégeois, où la famille de Calme possède un acte de propriété. Ce village est tenu par une milice qui filtre les arrivées et protège les habitants.

Avis :

Entre roman d’anticipation et fable écologique, l’autrice nous ballote sur les routes puis nous fait entrer dans ce village pyrénéen qui défend à tout prix son intégrité. Mais la nature est puissante et les hommes parfois bien trop faibles pour résister.

Le coté « fable » vient de la jeune Calme qui rejette la vie en communauté et décide de rejoindre la forêt. Elle se transforme peu à peu et acquiert des pouvoirs magiques.

J’ai trouvé le roman sympa à lire, un peu simpliste dans le combat entre nature et humain mais retraçant bien la nature humaine et ses dérives dès qu’il faut défendre sa propre vie.